Lucien LABORDE : présente Flavien SEMPÉRÉ au musée du Vieux Montmartre le 30 avril 1970

Mes chers amis

Dire que la première partie de cette soirée est consacrée à un peintre Ivryen ne signifie rien.

Yvry n’a pas, comme Montmartre ou Montparnasse le privilège d’être un haut-lieu de la peinture et Flavien SEMPERE que, que va nous présenter tout à l’heure notre chère Elise BEGUELIN, porte en lui un tout autre ciel que celui d’Ile de France, encore qu’il en ait subi l’intime enchantement.

Je ne vous entretiendrais, au demeurant ; ni de la peinture ni du peintre, mais un peu de l’homme.

Ce qui est un moyen détournée de parler des deux car rien dans la vie de SEMPERE, ne saurait être séparé de sa passion initiale.

Ce garçon. Je ne sais plus très bien en quel lieu, en quelle circonstance, ni à quel moment, je l’ai connu. Mais n’est-ce pas le fait de des profondes et solides amitiés de ne savoir de quoi elles sont faites, et à quel moment elles sont nées.

En cherchant un peu, je pense que nous avons du nous rencontrer à plusieurs reprises, au hasard de quelque inauguration de salon de peinture à Ivry.

SEMPERE est tout à la fois timide et hardi, curieux et réservé, observateur et discret.

C’est un silencieux doublé d’un étrange bavard, lorsque l’on a capté sa confiance.

Ouvert à toutes les conceptions, il s’intéresse aux recherches de son époque, lorsqu’elles lui semblent le fait de la sincérité et dépouillé de tout snobisme.

Mais sa probité irréprochable lui interdit d’exprimer ou de tenter d’exprimer autre chose que ce qu’il sent, ce qu’il vit.

La peinture est pour lui un matériau qui permet d’extérioriser, sous une forme plastique, le mystère de ses sens.

Distinct, il rejette les spéculations de l’esprit, lorsqu’elles tendent à une totale désincarnation.

Pour lui, seule la poésie est digne de compléter un univers de chair et de vie, conférant toute sa noblesse à la matière.

J’ai connu Flavien SEMPERE. Je l’ai compris. Non en sa présence propre, mais au contact du premier tableau de lui qui m’est été donné de voir.

Et tout de suite, j’ai été séduit par la poésie de ses péniches faites de clair obscur, de tendresse et d’incertitude, d’une juxtaposition difficile à définir d’éléments de quiétude et d’angoisse.

Car nous y voilà. Ce qui caractérise essentiellement notre ami, c’est bien cette dualité des clartés et des ombres, modulées en toute parcelle de son œuvre, jusqu’à sa plus intime, sa plus secrète luminosité dit une espérance bouleversée d’angoisse.

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